• EVANGELII GAUDIUM : l'exhortation à la joie du pape François

    EVANGELII GAUDIUM : l'exhortation à la joie du pape FrançoisPlus de chrétiens avec des faces de Carême sans Pâques ! La première exhortation apostolique du Pape vise le cœur de la vie chrétienne et de l'évangélisation.
    Présentation et extraits de la première exhortation apostolique du pape François sur l'annonce de l'Evangile aujourd'hui, publiée le 26 novembre 2013.

    Choisir, c’est renoncer. Voilà ce que se dit le journaliste chargé par sa rédaction de sélectionner quelques extraits – les meilleurs, si possible – d’Evangelii Gaudium, l’exhortation apostolique du Pape François sur « l’annonce de l’Evangile dans le monde d’aujourd’hui ».

    Ce long texte (288 articles) est en effet si dense et si riche qu’on peine à choisir tel article plutôt qu’un autre, parmi ceux  existants.

    Avec ses « phrases chocs » (« il y a des chrétiens qui semblent avoir un air de Carême sans Pâques »), son style et ses idées où transpire l’expérience de l’homme de terrain et dont certaines nous sont déjà connues, Evangelii Gaudium n’est pas sans rappeler les « homélies de Sainte Marthe » et les « catéchèses du mercredi ».

    Mais celles-ci, pourtant si appréciées, à juste titre, ne sont que des miettes, au regard de ce chef d’œuvre que l’Esprit Saint, par l’intermédiaire du successeur de Pierre, vient d’offrir à l’Eglise.

    Ce texte très personnel est comme une explosion, qui fait éclater au grand jour la culture et l’intelligence de ce pape à la pensée claire et structurée, sa longue expérience de pasteur proche de ses brebis et plus encore, la foi et la charité profonde de ce compagnon de Jésus et des pauvres ("Je désire une Eglise pauvre pour les pauvres", réaffirme-t-il dans ce texte où il consacre à ces derniers de nombreux articles)

    A travers cette feuille de route complète et concrète, qui nous donne les grandes lignes pastorales de son pontificat, le Pape, citant souvent ses prédécesseurs (notamment Paul VI et Jean Paul II) réaffirme avec force que l’Evangélisation,  qui n’est autre que l’annonce de « l’amour immense de Dieu, manifesté dans le Christ mort et ressuscité », est la mission première de l’Eglise. Une mission toujours ancienne et toujours nouvelle qui n’est pas l’apanage d’une élite, ou une option facultative pour ceux qui voudraient en faire un peu plus, mais la marque de fabrique de tout baptisé et la tâche de toute l’Eglise, sans cesse appelée à se réformer et à sortir d’elle-même.

    Chacun y puisera selon sa situation ou sa vocation : si je suis prêtre, j’y trouverai des conseils pour préparer mon homélie (Le Pape ne consacre pas moins de neuf articles à cette question, qui à elle seule, pourrait faire l’objet d’un « livret » spécifique). Si je suis tiède, je comprendrai pourquoi et comment raviver la flamme missionnaire ; Si je suis pauvre, je me sentirai aimé et important ; ceux qui sont engagés en politique, au service de la vie ou dans le dialogue œcuménique ou interreligieux, y trouveront des motifs d’encouragements… Tous, enfin, comprendront que la source de la joie se trouve dans la rencontre et l’amitié avec le Christ. (source : http://www.aleteia.org/fr/religion/article/evangelii-gaudium-lexhortation-a-la-joie-du-pape-francois-19254001)

    En bref, un texte de haut vol, qui confirme que le pape est un pasteur et un théologien de classe, et dont voici quelques extraits :

    Œuvre de Dieu, l’évangélisation nous demande tout, mais en même temps elle nous offre tout

    12. Bien que cette mission [évangéliser] nous demande un engagement généreux, ce serait une erreur de la comprendre comme une tâche personnelle héroïque, puisque l’œuvre est avant tout la sienne, au-delà de ce que nous pouvons découvrir et comprendre. Jésus est « le tout premier et le plus grand évangélisateur » (cf. Paul VI, Evangelii Nutiandi) Dans toute forme d’évangélisation, la primauté revient toujours à Dieu, qui a voulu nous appeler à collaborer avec lui et nous stimuler avec la force de son Esprit. La véritable nouveauté est celle que Dieu lui-même veut produire de façon mystérieuse, celle qu’il inspire, celle qu’il provoque, celle qu’il oriente et accompagne de mille manières. Dans toute la vie de l’Église, on doit toujours manifester que l’initiative vient de Dieu, que c’est « lui qui nous a aimés le premier » (1 Jn 4, 19) et que « c’est Dieu seul qui donne la croissance » (1 Co 3, 7). Cette conviction nous permet de conserver la joie devant une mission aussi exigeante qui est un défi prenant notre vie dans sa totalité. Elle nous demande tout, mais en même temps elle nous offre tout.

    Une Eglise transformée, au service de la mission

    27. J’imagine un choix missionnaire capable de transformer toute chose, afin que les habitudes, les styles, les horaires, le langage et toute structure ecclésiale devienne un canal adéquat pour l’évangélisation du monde actuel, plus que pour l’auto-préservation. La réforme des structures, qui exige la conversion pastorale, ne peut se comprendre qu’en ce sens : faire en sorte qu’elles deviennent toutes plus missionnaires, que la pastorale ordinaire en toutes ses instances soit plus expansive et ouverte, qu’elle mette les agents pastoraux en constante attitude de “sortie” et favorise ainsi la réponse positive de tous ceux auxquels Jésus offre son amitié. Comme le disait Jean-Paul II aux évêques de l’Océanie, « tout renouvellement dans l’Église doit avoir pour but la mission, afin de ne pas tomber dans le risque d’une Église centrée sur elle-même ». (cf. Ecclesia in oceania).

    Une conversion pastorale qui aille dans le sens de la décentralisation et donne davantage d’autorité aux conférences épiscopales

    32. Du moment que je suis appelé à vivre ce que je demande aux autres, je dois aussi penser à une conversion de la papauté. Il me revient, comme Évêque de Rome, de rester ouvert aux suggestions orientées vers un exercice de mon ministère qui le rende plus fidèle à la signification que Jésus-Christ entend lui donner, et aux nécessités actuelles de l’évangélisation (…) La papauté aussi, et les structures centrales de l’Église universelle, ont besoin d’écouter l’appel à une conversion pastorale. Le Concile Vatican II a affirmé que, d’une manière analogue aux antiques Églises patriarcales, les conférences épiscopales peuvent « contribuer de façons multiples et fécondes à ce que le sentiment collégial se réalise concrètement ». Mais ce souhait ne s’est pas pleinement réalisé, parce que n’a pas encore été suffisamment explicité un statut des conférences épiscopales qui les conçoive comme sujet d’attributions concrètes, y compris une certaine autorité doctrinale authentique. Une excessive centralisation, au lieu d’aider, complique la vie de l’Église et sa dynamique missionnaire.

    L’Eglise n’est pas une douane, mais une maison aux portes ouvertes, où il y a de la place pour chacun

    47. L’Église est appelée à être toujours la maison ouverte du Père. Un des signes concrets de cette ouverture est d’avoir partout des églises avec les portes ouvertes. De sorte que, si quelqu’un veut suivre une motion de l’Esprit et s’approcher pour chercher Dieu, il ne rencontre pas la froideur d’une porte close. Mais il y a d’autres portes qui ne doivent pas non plus se fermer. Tous peuvent participer de quelque manière à la vie ecclésiale, tous peuvent faire partie de la communauté, et même les portes des sacrements ne devraient pas se fermer pour n’importe quelle raison. Ceci vaut surtout pour ce sacrement qui est “ la porte”, le Baptême. L’Eucharistie, même si elle constitue la plénitude de la vie sacramentelle, n’est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles. Ces convictions ont aussi des conséquences pastorales que nous sommes appelés à considérer avec prudence et audace. Nous nous comportons fréquemment comme des contrôleurs de la grâce et non comme des facilitateurs. Mais l’Église n’est pas une douane, elle est la maison paternelle où il y a de la place pour chacun avec sa vie difficile.

     Le mariage n’est pas une simple forme de gratification affective qui peut se constituer de n’importe quelle façon

    66. La famille traverse une crise culturelle profonde, comme toutes les communautés et les liens sociaux. Dans le cas de la famille, la fragilité des liens devient particulièrement grave parce qu’il s’agit de la cellule fondamentale de la société, du lieu où l’on apprend à vivre ensemble dans la différence et à appartenir aux autres et où les parents transmettent la foi aux enfants. Le mariage tend à être vu comme une simple forme de gratification affective qui peut se constituer de n’importe quelle façon et se modifier selon la sensibilité de chacun. Mais la contribution indispensable du mariage à la société dépasse le niveau de l’émotivité et des nécessités contingentes du couple. Comme l’enseignent les Évêques français, elle ne naît pas « du sentiment amoureux, par définition éphémère, mais de la profondeur de l’engagement pris par les époux qui acceptent d’entrer dans une union de vie totale ».

    La peur de trop donner et l’obsession du temps libre

    81. Quand nous avons davantage besoin d’un dynamisme missionnaire qui apporte sel et lumière au monde, beaucoup de laïcs craignent que quelqu’un les invite à réaliser une tâche apostolique, et cherchent à fuir tout engagement qui pourrait leur ôter leur temps libre. Aujourd’hui, par exemple, il est devenu très difficile de trouver des catéchistes formés pour les paroisses et qui persévèrent dans leur tâche durant plusieurs années. Mais quelque chose de semblable arrive avec les prêtres, qui se préoccupent avec obsession de leur temps personnel. Fréquemment, cela est dû au fait que les personnes éprouvent le besoin impérieux de préserver leurs espaces d’autonomie, comme si un engagement d’évangélisation était un venin dangereux au lieu d’être une réponse joyeuse à l’amour de Dieu qui nous convoque à la mission et nous rend complets et féconds. Certaines personnes font de la résistance pour éprouver jusqu’au bout le goût de la mission et restent enveloppées dans une acédie paralysante.

    86 (…) Nous sommes appelés à être des personnes-amphores pour donner à boire aux autres. Parfois, l’amphore se transforme en une lourde croix, mais c’est justement sur la Croix que le Seigneur, transpercé, s’est donné à nous comme source d’eau vive. Ne nous laissons pas voler l’espérance !

    La mondanité spirituelle, danger pour l’Eglise

    93. La mondanité spirituelle, qui se cache derrière des apparences de religiosité et même d’amour de l’Église, consiste à rechercher, au lieu de la gloire du Seigneur, la gloire humaine et le bien être personnel. C’est ce que le Seigneur reprochait aux pharisiens : « Comment pouvez-vous croire, vous qui recevez la gloire les uns des autres, et ne cherchez pas la gloire qui vient du Dieu unique ? » (Jn 5, 44). Il s’agit d’une manière subtile de rechercher « ses propres intérêts, non ceux de Jésus-Christ » (Ph 2, 21). Elle prend de nombreuses formes, suivant le type de personne et la circonstance dans laquelle elle s’insinue. Du moment qu’elle est liée à la recherche de l’apparence, elle ne s’accompagne pas toujours de péchés publics, et, extérieurement, tout semble correct. Mais si elle envahissait l’Église, « elle serait infiniment plus désastreuse qu’une quelconque autre mondanité simplement morale ».

    Le sacerdoce ministériel, un moyen que Jésus utilise au service de son peuple

    104. Les revendications des droits légitimes des femmes, à partir de la ferme conviction que les hommes et les femmes ont la même dignité, posent à l’Église des questions profondes qui la défient et que l’on ne peut éluder superficiellement. Le sacerdoce réservé aux hommes, comme signe du Christ Époux qui se livre dans l’Eucharistie, est une question qui ne se discute pas, mais peut devenir un motif de conflit particulier si on identifie trop la puissance sacramentelle avec le pouvoir. Il ne faut pas oublier que lorsque nous parlons de pouvoir sacerdotal « nous sommes dans le concept de la fonction, non de la dignité et de la sainteté ». Le sacerdoce ministériel est un des moyens que Jésus utilise au service de son peuple, mais la grande dignité vient du Baptême, qui est accessible à tous. La configuration du prêtre au Christ-Tête – c’est-à-dire comme source principale de la grâce – n’entraîne pas une exaltation qui le place en haut de tout le reste. Dans l’Église, les fonctions « ne justifient aucune supériorité des uns sur les autres ». De fait, une femme, Marie, est plus importante que les évêques. Même quand on considère la fonction du sacerdoce ministériel comme “hiérarchique”, il convient de bien avoir présent qu’« elle est totalement ordonnée à la sainteté des membres du Christ ». Sa clé et son point d’appui fondamental ne sont pas le pouvoir entendu comme domination, mais la puissance d’administrer le sacrement de l’Eucharistie ; de là dérive son autorité, qui est toujours un service du peuple. C’est un grand défi qui se présente ici aux pasteurs et aux théologiens, qui pourraient aider à mieux reconnaître ce que cela implique par rapport au rôle possible de la femme là où se prennent des décisions importantes, dans les divers milieux de l’Église.

    Consacrer du temps à la préparation des homélies

    145. La préparation de la prédication est une tâche si importante qu’il convient d’y consacrer un temps prolongé d’étude, de prière, de réflexion et de créativité pastorale (…) Certains curés soutiennent souvent que cela n’est pas possible en raison de la multitude des tâches qu’ils doivent remplir ; cependant, j’ose demander que chaque semaine, un temps personnel et communautaire suffisamment prolongé soit consacré à cette tâche, même s’il faut donner moins de temps à d’autres engagements, même importants. La confiance en l’Esprit Saint qui agit dans la prédication n’est pas purement passive, mais active et créative. Elle implique de s’offrir comme instrument (cf. Rm 12, 1), avec toutes ses capacités, pour qu’elles puissent être utilisées par Dieu. Un prédicateur qui ne se prépare pas n’est pas “spirituel”, il est malhonnête et irresponsable envers les dons qu’il a reçus.

    La première annonce

    164. (…) Sur la bouche du catéchiste revient toujours la première annonce : “Jésus Christ t’aime, il a donné sa vie pour te sauver, et maintenant il est vivant à tes côtés chaque jour pour t’éclairer, pour te fortifier, pour te libérer”. Quand nous disons que cette annonce est “la première”, cela ne veut pas dire qu’elle se trouve au début et qu’après elle est oubliée ou remplacée par d’autres contenus qui la dépassent. Elle est première au sens qualitatif, parce qu’elle est l’annonce principale, celle que l’on doit toujours écouter de nouveau de différentes façons et que l’on doit toujours annoncer de nouveau durant la catéchèse sous une forme ou une autre, à toutes ses étapes et ses moments. Pour cela aussi « le prêtre, comme l’Église, doit prendre de plus en plus conscience du besoin permanent qu’il a d’être évangélisé ».

    La place fondamentale de la Parole de Dieu, inséparable de l’Eucharistie

    174. Ce n’est pas seulement l’homélie qui doit se nourrir de la Parole de Dieu. Toute l’évangélisation est fondée sur elle, écoutée, méditée, vécue, célébrée et témoignée. La Sainte Écriture est source de l’évangélisation. Par conséquent, il faut se former continuellement à l’écoute de la Parole. L’Église n’évangélise pas si elle ne se laisse pas continuellement évangéliser. Il est indispensable que la Parole de Dieu « devienne toujours plus le cœur de toute activité ecclésiale ». La Parole de Dieu écoutée et célébrée, surtout dans l’Eucharistie, alimente et fortifie intérieurement les chrétiens et les rend capables d’un authentique témoignage évangélique dans la vie quotidienne. Nous avons désormais dépassé cette ancienne opposition entre Parole et Sacrement. La Parole proclamée, vivante et efficace, prépare à la réception du sacrement et dans le sacrement cette Parole atteint son efficacité maximale.

    Une Eglise pauvre pour les pauvres, par qui nous devons nous laisser évangéliser

    198. Pour l’Église, l’option pour les pauvres est une catégorie théologique avant d’être culturelle, sociologique, politique ou philosophique. Dieu leur accorde « sa première miséricorde ». Cette préférence divine a des conséquences dans la vie de foi de tous les chrétiens, appelés à avoir « les mêmes sentiments qui sont dans le Christ Jésus » (Ph 2, 5). Inspirée par elle, l’Église a fait une option pour les pauvres, entendue comme une « forme spéciale de priorité dans la pratique de la charité chrétienne dont témoigne toute la tradition de l’Église ». Cette option – enseignait Benoît XVI – « est implicite dans la foi christologique en ce Dieu qui s’est fait pauvre pour nous, pour nous enrichir de sa pauvreté ». Pour cette raison, je désire une Église pauvre pour les pauvres. Ils ont beaucoup à nous enseigner. En plus de participer au sensus fidei, par leurs propres souffrances ils connaissent le Christ souffrant. Il est nécessaire que tous nous nous laissions évangéliser par eux. La nouvelle évangélisation est une invitation à reconnaître la force salvifique de leurs existences, et à les mettre au centre du cheminement de l’Église. Nous sommes appelés à découvrir le Christ en eux, à prêter notre voix à leurs causes, mais aussi à être leurs amis, à les écouter, à les comprendre et à accueillir la mystérieuse sagesse que Dieu veut nous communiquer à travers eux.

    La politique, une des formes les plus précieuses de la charité

    205. Je demande à Dieu que s’accroisse le nombre d’hommes politiques capables d’entrer dans un authentique dialogue qui s’oriente efficacement pour soigner les racines profondes et non l’apparence des maux de notre monde ! La politique tant dénigrée, est une vocation très noble, elle est une des formes les plus précieuses de la charité, parce qu’elle cherche le bien commun. Nous devons nous convaincre que la charité « est le principe non seulement des micro-relations : rapports amicaux, familiaux, en petits groupes, mais également des macro-relations : rapports sociaux, économiques, politiques ». Je prie le Seigneur qu’il nous offre davantage d’hommes politiques qui aient vraiment à cœur la société, le peuple, la vie des pauvres ! Il est indispensable que les gouvernants et le pouvoir financier lèvent les yeux et élargissent leurs perspectives, qu’ils fassent en sorte que tous les citoyens aient un travail digne, une instruction et une assistance sanitaire. Et pourquoi ne pas recourir à Dieu afin qu’il inspire leurs plans ? Je suis convaincu qu’à partir d’une ouverture à la transcendance pourrait naître une nouvelle mentalité politique et économique, qui aiderait à dépasser la dichotomie absolue entre économie et bien commun social.

    Immigration : être accueillant et généreux

    210 (…). Les migrants me posent un défi particulier parce que je suis Pasteur d’une Église sans frontières qui se sent mère de tous. Par conséquent, j’exhorte les pays à une généreuse ouverture, qui, au lieu de craindre la destruction de l’identité locale, soit capable de créer de nouvelles synthèses culturelles. Comme elles sont belles les villes qui dépassent la méfiance malsaine et intègrent ceux qui sont différents, et qui font de cette intégration un nouveau facteur de développement ! Comme elles sont belles les villes qui, même dans leur architecture, sont remplies d’espaces qui regroupent, mettent en relation et favorisent la reconnaissance de l’autre !

    L’urgence, pour l’évangélisation, de l’unité entre les chrétiens

    246. Étant donné la gravité du contre témoignage de la division entre chrétiens, particulièrement en Asie et en Afrique, la recherche de chemins d’unité devient urgente. Les missionnaires sur ces continents répètent sans cesse les critiques, les plaintes et les moqueries qu’ils reçoivent à cause du scandale des chrétiens divisés. Si nous nous concentrons sur les convictions qui nous unissent et rappelons le principe de la hiérarchie des vérités, nous pourrons marcher résolument vers des expressions communes de l’annonce, du service et du témoignage. La multitude immense qui n’a pas reçu l’annonce de Jésus Christ ne peut nous laisser indifférents. Néanmoins, l’engagement pour l’unité qui facilite l’accueil de Jésus Christ ne peut être pure diplomatie, ni un accomplissement forcé, pour se transformer en un chemin incontournable d’évangélisation. Les signes de division entre les chrétiens dans des pays qui sont brisés par la violence, ajoutent d’autres motifs de conflit de la part de ceux qui devraient être un actif ferment de paix. Elles sont tellement nombreuses et tellement précieuses, les réalités qui nous unissent ! Et si vraiment nous croyons en la libre et généreuse action de l’Esprit, nous pouvons apprendre tant de choses les uns des autres ! Il ne s’agit pas seulement de recevoir des informations sur les autres afin de mieux les connaître, mais de recueillir ce que l’Esprit a semé en eux comme don aussi pour nous. Simplement, pour donner un exemple, dans le dialogue avec les frères orthodoxes, nous les catholiques, nous avons la possibilité d’apprendre quelque chose de plus sur le sens de la collégialité épiscopale et sur l’expérience de la synodalité. A travers un échange de dons, l’Esprit peut nous conduire toujours plus à la vérité et au bien.

    Le lien  avec nos frères aînés dans la foi

    249. Dieu continue à œuvrer dans le peuple de la première Alliance et fait naître des trésors de sagesse qui jaillissent de sa rencontre avec la Parole divine. Pour cela, l’Église aussi s’enrichit lorsqu’elle recueille les valeurs du Judaïsme. Même si certaines convictions chrétiennes sont inacceptables pour le Judaïsme, et l’Église ne peut pas cesser d’annoncer Jésus comme Seigneur et Messie, il existe une riche complémentarité qui nous permet de lire ensemble les textes de la Bible hébraïque et de nous aider mutuellement à approfondir les richesses de la Parole, de même qu’à partager beaucoup de convictions éthiques ainsi que la commune préoccupation pour la justice et le développement des peuples.

    Islam : appel à la réciprocité

    253 (…) Nous chrétiens, nous devrions accueillir avec affection et respect les immigrés de l’Islam qui arrivent dans nos pays, de la même manière que nous espérons et nous demandons à être accueillis et respectés dans les pays de tradition islamique. Je prie et implore humblement ces pays pour qu’ils donnent la liberté aux chrétiens de célébrer leur culte et de vivre leur foi, prenant en compte la liberté dont les croyants de l’Islam jouissent dans les pays occidentaux ! Face aux épisodes de fondamentalisme violent qui nous inquiètent, l’affection envers les vrais croyants de l’Islam doit nous porter à éviter d’odieuses généralisations, parce que le véritable Islam et une adéquate interprétation du Coran s’opposent à toute violence.

    La contemplation, âme de l’évangélisation

    264. La première motivation pour évangéliser est l’amour de Jésus que nous avons reçu, l’expérience d’être sauvés par lui qui nous pousse à l’aimer toujours plus. Mais, quel est cet amour qui ne ressent pas la nécessité de parler de l’être aimé, de le montrer, de le faire connaître ? Si nous ne ressentons pas l’intense désir de le communiquer, il est nécessaire de prendre le temps de lui demander dans la prière qu’il vienne nous séduire. Nous avons besoin d’implorer chaque jour, de demander sa grâce pour qu’il ouvre notre cœur froid et qu’il secoue notre vie tiède et superficielle (…) Qu’il est doux d’être devant un crucifix, ou à genoux devant le Saint-Sacrement, et être simplement sous son regard ! Quel bien cela nous fait qu’il vienne toucher notre existence et nous pousse à communiquer sa vie nouvelle ! (…) La meilleure motivation pour se décider à communiquer l’Évangile est de le contempler avec amour, de s’attarder en ses pages et de le lire avec le cœur. Si nous l’abordons de cette manière, sa beauté nous surprend, et nous séduit chaque fois (…)

    Sur cette terre, je suis une mission

    273. La mission au cœur du peuple n’est ni une partie de ma vie ni un ornement que je peux quitter, ni un appendice ni un moment de l’existence. Elle est quelque chose que je ne peux pas arracher de mon être si je ne veux pas me détruire. Je suis une mission sur cette terre, et pour cela je suis dans ce monde. Je dois reconnaître que je suis comme marqué au feu par cette mission afin d’éclairer, de bénir, de vivifier, de soulager, de guérir, de libérer. Là apparaît l’infirmière dans l’âme, le professeur dans l’âme, le politique dans l’âme, ceux qui ont décidé, au fond, d’être avec les autres et pour les autres. Toutefois, si une personne met d’un côté son devoir et de l’autre sa vie privée, tout deviendra triste, et elle vivra en cherchant sans cesse des gratifications ou en défendant ses propres intérêts. Elle cessera d’être peuple.

    Le style missionnaire de Marie

    288. Il y a un style marial dans l’activité évangélisatrice de l’Église. Car, chaque fois que nous regardons Marie nous voulons croire en la force révolutionnaire de la tendresse et de l’affection. En elle, nous voyons que l’humilité et la tendresse ne sont pas les vertus des faibles, mais des forts, qui n’ont pas besoin de maltraiter les autres pour se sentir importants. En la regardant, nous découvrons que celle qui louait Dieu parce qu’« il a renversé les potentats de leurs trônes » et « a renvoyé les riches les mains vides » (Lc 1, 52.53) est la même qui nous donne de la chaleur maternelle dans notre quête de justice. C’est aussi elle qui « conservait avec soi toutes ces choses, les méditant en son cœur » (Lc 2, 19). Marie sait reconnaître les empreintes de l’Esprit de Dieu aussi bien dans les grands événements que dans ceux qui apparaissent imperceptibles. Elle contemple le mystère de Dieu dans le monde, dans l’histoire et dans la vie quotidienne de chacun de nous et de tous. Elle est aussi bien la femme orante et laborieuse à Nazareth, que notre Notre-Dame de la promptitude, celle qui part de son village pour aider les autres « en hâte » (cf. Lc 1, 39-45). Cette dynamique de justice et de tendresse, de contemplation et de marche vers les autres, est ce qui fait d’elle un modèle ecclésial pour l’évangélisation. Nous la supplions afin que, par sa prière maternelle, elle nous aide pour que l’Église devienne une maison pour beaucoup, une mère pour tous les peuples, et rende possible la naissance d’un monde nouveau. C’est le Ressuscité qui nous dit, avec une force qui nous comble d’une immense confiance et d’une espérance très ferme : « Voici, je fais l’univers nouveau ».

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